1. |
Dans les pas du soir
03:45
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DANS LES PAS DU SOIR
des signaux des questions
des destins qui se cherchent
des ombres qui s’enflamment
dans les pas du soir
la vie jamais gagnée
les jours toujours perdus
demain reste en suspens
dans les pas du soir
un endroit à trouver
à l’envers du décor
quand s’ouvre un horizon
dans les pas du soir
se retrouver ailleurs
pour être enfin ici
à un moment donné
dans les pas du soir
quand tout perd un peu de son emprise
l’intérieur s’éclaire en douce
je sens vivre la vie
dans les pas du soir
mes pas ont rejoint la beauté des fleurs du Mal
« sois sage
ô ma Douleur
et tiens-toi plus tranquille
tu réclamais le Soir
le voici
il descend
et
comme un long linceul traînant à l’Orient
entends
ma chère
entends la douce Nuit qui marche » (1)
texte, musique et photo : Jean Perron
(1) extrait de Recueillement, Charles Baudelaire, Les fleurs du Mal
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2. |
Rivages
04:05
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RIVAGES
sur les rivages du passé
combien de rêves abandonnés
l'eau sous les ponts coule au même rythme
mais le temps semble aller plus vite
chaque visage dans le trafic
reste une question sans réponse
un scénario jamais tourné
une belle journée qui s'est ennuagée
les passagers du petit matin
se demandent encore où va leur vie
les jours se suivent sans laisser de traces
et disparaissent à l'horizon
sur les rivages du futur
combien de rêves vont échouer
le trafic roule au ralenti
sans empêcher le temps de s'enfuir
quand vient le soir je vais près de l'eau
me demande encore où va ma vie
et je contemple la beauté du jour
qui disparaît à l'horizon
paroles et musique : Jean Perron
(chanson composée le 18 juillet 2013)
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3. |
Ligne de feu
04:50
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LIGNE DE FEU
à la dernière heure de clarté
assiégés que nous sommes
comment recoudre
à ce qu’on appelle le tissu social
cet enchantement
la douceur du soleil dans la mêlée des feuilles
qui connaît la valeur d’un rayon de soleil
s’il n’est pas sur le marché des abeilles grises
comment dire cette douceur de vivre
et comment la défendre
sans l’échanger contre un fusil
je n’aime pas les bâtisseurs d’empires
et je ne serai jamais un notable
dans ce qui est vrai
il n’y a pas d’ordre de grandeur
la comptabilité s’enlise
dans la vase des options
la fracturation hydraulique des cerveaux
pour en extraire une obéissance de plomb
mais des bruits
légers
font tressaillir les buissons
et naître une peur rouge
dans les yeux des grands prédateurs
paroles et musique : Jean Perron
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4. |
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LA RUE EST DANS MES CORDES
des allers-retours et des grands détours
avec la lumière du jour
l’alphabet des pas réécrit le monde
comme on ouvre une fenêtre
car la rue est dans mes cordes
oui la rue est dans mes cordes
des voix sous la pluie au-delà des murs
et des façades du temps
la vie en mouvement dans les pas qui sonnent
pour aller à ta rencontre
car la rue est dans mes cordes
oui la rue est dans mes cordes
pour s’aérer les idées
au hasard des enjambées
pour secouer la poussière ou rêver sans frontière
comme on se joint à une fête
et s‘il faut se faire entendre
au-delà des confidences
c’est aussi dans la rue que résonne le chant
qui peut réunir les gens
dans la nuit d’été il tombe des cordes
je les regarde briller
l’air est doux
les heures s’écoulent sans heurts
et la rue est dans mes cordes
paroles et musique : Jean Perron
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5. |
Pommetiers
04:00
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POMMETIERS
entre deux dossiers urgents
une pluie de pétales
rosés ou blancs
déjà un prélude à l'automne et à l'hiver
ou simplement un rappel
la fin est inscrite dès le début
présente
active
parfaitement visible
comme les rides sur la peau des bébés
ou le vent dans la jupe fendue d'une passante
je m'installe dos au soleil sur une terrasse
pour que la lumière m'entraîne devant
sur la rivière des rythmes
et je me demande
si quand la nuit tombera
les masques suivront
même si je sais d'expérience
qu'il faut des mois
sinon des années
pour découvrir un seul visage
et surtout pour l'aimer
dans sa sublime imperfection
si ici-bas tout n'est que poussière de collisions
en haut ne s'ébattent que des créatures imaginaires
parmi les volatiles
aux cervelles proverbialement menues
et vides
avec tout ce que cela comporte d'infini
et moi qui m'acharne à graver l'éternité
au coeur même du quotidien
et le quotidien sur la pierre des millénaires
comme si l'éternité ne couchait pas avec l'ennui
au fond des marécages
avec l'immuable persistance du brouhaha
un squelette d'habitudes
scénarios récurrents
petites misères et faux bonheurs
fatigué
le ciel ferme son oeil de cyclope injecté de sang
la foule change de visages mais rien n'est révélé
les voix sont des airs à remixer
dans d'autres décors
pour faire de chaque répétition
un lieu de création
la modulation d'une présence
j'aimerais extraire
de chaque rayon de vie
un univers à la mesure d'un appétit
capable de rivaliser
avec des milliards d'astres divisés
et les fleurs passent des arbres
aux robes en mouvement
ivre des soupirs de la nuit nouvelle
un lilas titube et souffle son haleine aux passants
une auto-patrouille longe lentement la rue
je regarde un écran vide
sur un mur de brique rousse
j'y plonge pour réinventer le cinéma
celui des soirs tombés des poches de la mort
quand un seul être suffit à peupler la terre
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait de Orchestre fugitif, Écrits des Forges, 1999)
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6. |
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DANSENT L'AMOUR ET LA PLUIE
dans le miroir des rues
l'amour fait des gammes de néons
et je danse avec la pluie
en évitant les flaques
les lampadaires portent des cravates
de feux verts jaunes rouges
et dans les vitrines
les mannequins
ont des larmes aux yeux
buée de blues
télé fenêtres clignotantes
arcs-en-ciel éclatés
dans l'huile des moteurs percés
la ville se recueille
dans l'ombre des forêts
la terre cesse de tourner
et devient une guitare
nos corps forment les cordes
Danse l'amour
Danse la pluie
Dansent l'amour et la pluie
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7. |
Veillée
04:45
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VEILLÉE
(aux campeurs)
je suis celui qui hypnotise l'incendie
les flammes sont hautes et belles
je m'assois en sorcier
pour les graver
dans mon poème
comme si mon poème devait durer toujours
et comme si cela était possible
un feu jamais réduit à ses cendres
les voix des voisins se mêlent à mon feu
parmi les branches cassées
les malheurs flamboyants
« elle ne reconnaît plus personne »
dit quelqu'un
un bébé pleure
un chien jappe
« elle qui était si intelligente »
soudain
d'autres voix envahissent les braises qui craquent
des baigneurs nocturnes
ivres
s'interpellent à tue-tête
comme en plein jour
comme si la plage était bondée et bruyante
« elle qui avait tant d'énergie »
toutes les voix s'éteignent
tout disparaît dans l'obscurité
mais pas mon feu
j'entends respirer les silhouettes de la nuit
des bruits de pas se mêlent au doux crépitement
pas un souffle de vent
je reste seul à veiller
sur je ne sais quoi
peut-être les rêves
les plus
simplement
impossibles
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait de Des rêves que personne ne peut gérer, Écrits des Forges, 1996)
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8. |
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À L'HEURE DE POINTE DE LA NUIT
la nuit les rues serpents bariolés
caméléons de néons
dans toutes les villes du monde
les marcheurs solitaires qui délirent
et voient des ombres qui dansent
derrière les fenêtres
je suis
seul parmi
tous les desperados
après
le last call
à l'heure de pointe de la nuit
visions de saisons qui passent en courant
sur les trottoirs usés
au rythme des passants
les graffiti qui restent incrustés
sur les murs des vieux quartiers
parmi les taches de sang
je suis
seul parmi
tous les desperados
après
le last call
à l'heure de pointe de la nuit
lentement les bars se vident
après les derniers verres et les bagarres
la nuit se décompose
taxi détresse néons
tendresse vitrines violence débordements
sirènes feux clignotants
je suis
seul parmi
tous les desperados
après
le last call
à l'heure de pointe de la nuit
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait de Rock Desperado, Écrits des Forges, 1986)
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9. |
Les balcons déserts
04:45
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LES BALCONS DÉSERTS
quand dans les collines
où la ville rend l'âme
le soleil du printemps dessine des rosiers
à la lisière du jour et de la nuit
quand les nuages deviennent des coeurs saignants
parmi les arbres dégoulinant
de vert tendre
et que dans l'air vif
et la clarté du soir
les grenouilles chantent
leurs accouplements
quand l'été réinvente l'amour
dans les toisons de feuillages à l'horizon
quand la ville devient rivière de perles
sur la peau bronzée des collines
quand avec le soleil s'étirent les cigales
dans la moiteur du crépuscule
et que la lune
marguerite effeuillée
se laisse butiner par des étoiles bleues
quand l'automne
le soir a un moment de douceur
fenêtre ouverte
je me rappelle
et j'écris
des saisons et des lieux
disparus de mes trajets
j'exhale un feu
de couleurs
de sons
de parfums
et les balcons restent déserts
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait de Instantanés, Les Éditions L'Interligne, 2006)
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10. |
Poème trouvé sur un fou
04:15
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POÈME TROUVÉ SUR UN FOU
le froid sur la ville me va jusqu'au coeur
les phares glacés n'éclairent que l'absence
tous mes trajets dérivent autour de ta maison
je suis un satellite de ton corps
ensorcelé par les lieux que tu habites
les objets que tu touches
les parfums qui te ressemblent
je tourne en rond dans la nuit sans pitié
le froid sur ta rue me va jusqu'au coeur
tu es là je sais tu n'es pas seule
je suis un intrus dans ta vie tranquille
un fantôme échappé de ton ennui
comme cet arbre devant ta maison
dépouillé de mes feuilles je tremble avec le vent
le froid de l'automne me va jusqu'au coeur
la lune glacée n'éclaire que l'absence
je n'étais qu'un désir dans ton corps tourmenté
tes yeux m'ont donné vie au détour d'un regard
maintenant ton visage flotte autour de moi
me suit partout derrière une vitre de pluie
je deviens fou dans la ville endormie
je suis le vent qui crie à ta fenêtre
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait de Ce qui bat plus fort que la peur, Écrits des Forges, 1991)
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11. |
Les femmes de l'hiver
04:00
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LES FEMMES DE L’HIVER
un œil en proie à un blizzard
l’autre étincelant de soleil sur la neige
leur main tendue
une page blanche
leur sourire
un astre déjà vu
mais toujours luisant d’inconnu
on les prend dans ses bras
ces anges en chute libre
les femmes de l’hiver
on valse avec elles
sans jamais savoir
lequel des deux berce l’autre
dans l’haleine embuée des soirs transis
étoilés du givre de leurs larmes
sœurs de chair des nuages
la glace brisée
elles repartent
au moment même
où l’on perd pied
des images rongées par le feu
laissent des traces dans l’obscurité
on les a aimées
comme on aime le printemps
en plein cœur de l’hiver
paroles et musique : Jean Perron
(texte extrait du recueil Instantanés, Éditions L'Interligne, 2006)
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12. |
Sous le manteau
03:10
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SOUS LE MANTEAU
bien sûr elles ne valent rien à la Bourse
ces traces d’or
au fond du ciel fissuré de branches nues
les bras de la nuit agitant la main
et les oiseaux dont l’ombre effleure les murs
en se glissant par la porte-fenêtre
comment peuvent-ils vivre par un froid pareil
pas une goutte n’est tombée des toits aujourd’hui
pendant que je patinais au milieu de la ville
le soleil trop intense au fond des yeux
le vent cruel sur la peau
je les réconcilie dans l’or de mes traces
qui ne valent rien à la Bourse
mais qui suivent les regards qu’elles croisent
parmi les ombres vives des oiseaux de l’hiver
pour aller s’accoupler aux couleurs de la nuit
dans le bassin d’une éternelle fontaine
gestes gratuits
paroles données
des pas de danse et des éclats de rire
la chaleur de juin remue
sous le manteau de janvier
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Jean Perron Québec
Écrivain, musicien et artiste visuel, Jean Perron a publié 24 livres en plus de créer entièrement plusieurs albums de pièces instrumentales, de chansons et de poésie accompagnée de musique. Il réalise aussi des courts métrages, y compris des vidéos de certaines de ses compositions. ... more
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