1. |
Marée basse
03:20
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MARÉE BASSE
ouvrir les yeux repousser les ténèbres
prendre une grande respiration
laisser l’air parcourir mon corps
commencer le jour à marée basse
sans me presser descendre l’escalier
prendre un café au miel et au lait
remonter allumer l’ordinateur
dans mon espace de travail
des idées à mûrir ou décanter
à grands pas sortir de la maison
dans les rues dans les sentiers sur les pistes
marcher pour le plaisir de marcher
maintenant l’air que j’avais respiré
à mon réveil couché dans mon lit
se transforme en air de musique
et des mots s’écrivent dans ma tête
voici le soir une énergie nouvelle
derrière ma fenêtre éclairée
encore envie de jouer de la guitare
mais aussi de vous tendre la main
sur les cordes sensibles de la vie
le monde a soif de bonté de beauté
la lune et le soleil se rencontrent
dans les marées sous nos paupières
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2. |
L'alphabet des pas
04:35
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L’ALPHABET DES PAS
les cloches sonnent sans raison et nous aussi
sonnez cloches sans raison et nous aussi
nous nous réjouirons au bruit des chaînes
que nous ferons sonner en nous avec les cloches
quel est ce langage qui nous fouette nous sursautons dans la lumière
nos nerfs sont des fouets entre les mains du temps
comme le papier froissé de l’emballage défait
et toutes nos actions sont contrôlées il n’y a rien de caché
l’eau de la rivière a tant lavé son lit
que même la lumière glisse sur l’onde lisse
et tombe au fond avec le lourd éclat des pierres
les cloches sonnent sans raison et nous aussi
les soucis que nous portons avec nous
qui sont nos vêtements intérieurs
que nous mettons tous les matins
que la nuit défait avec des mains de rêve
nous partons avec les départs arrivons avec les arrivées
partons avec les arrivées arrivons quand les autres partent
nous marchons pour échapper au fourmillement des routes
je sais que je porte la mélodie en moi et n’en ai pas peur
la nuit vieille de masques laisse toutes les nuits entrer en moi
sa longue jeunesse qui ne perdra plus pied
sur ce sol ennemi
avec l’air que l’on chante lointain
de plus en plus lointaine enfance
un ange ne craint pas de rester suspendu dans l’air
après avoir jeté la clef par la fenêtre
quel est ce sourire perpétuel qui nous regarde
et que les nuits d’été nous appelons mystère
imparfaits retours des longues méditations magiques
des méditations chercheuses de hantises et d’éclatements
des pointes extrêmes des lumineuses longitudes
des hauts regards de la fatigue des neiges
œil toujours neuf au retour des choses
homme un peu animal un peu fleur un peu métal un peu homme
un peu d’or parsemé entre les forêts et les lacs
les rivières se penchent à ton oreille et disent la secrète histoire
afin que tes doigts puissent continuer leur course à travers les pistes musicales
un homme est si peu de choses qu’un fin filet de vent l’emporte l’homme
il faut savoir regarder avec un œil plus grand qu’une ville
car chaque note est grande et voit
(Extraits choisis de L’homme approximatif de Tristan Tzara)
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3. |
Le travail
03:55
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LE TRAVAIL
1
on dit que les maisons travaillent quand elles craquent
si travailler est quelque chose qui s’entend
l’effondrement du monde implique un dur labeur
ne me cherchez plus sous quelque décombre
mais dans le silence qui suit l’étonnement
silence rempli de moteurs et d’horloges
plus il craque plus le monde travaille
on avait cru que c’était le contraire
bande de paresseux cachez-vous
dans les bâtiments les plus neufs
2
sous son air d’homme ordinaire
il se voit en super héros
quand on y pense il l’est vraiment
pour remplir ses obligations
sous son fard de femme exemplaire
elle cherche son vrai visage
elle aimerait bien faire autre chose
sans avoir à se vendre
prisonniers de la fin du mois
ils ont oublié la question
qu’ils posent pourtant aux enfants
que veulent-ils faire dans la vie
dans les lueurs du petit jour
apparaît un animal
peut-être un chien peut-être un loup
il fait signe de le suivre
travailler sur soi-même
comme on entretient sa maison
meilleur moyen d’éviter
de craquer en fin de journée
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4. |
À ciel ouvert
03:55
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À CIEL OUVERT
des ombres de goélands
une ronde sur l’asphalte
d’autres oiseaux
noirs et téméraires
semblent vouloir défier les machines humaines
ils traversent à la hauteur des museaux qui grondent
se mesurent à la vitesse des moteurs
au dernier moment
à fleur de collision
pendant qu’au-dessus de l’autoroute
les goélands se contentent de tourner
est-ce l’air
le ciel
l’espace
que ces oiseaux disputent aux hommes
jusqu’au niveau du sol
sont-ils messagers de la mort
une malédiction guettant les pare-brise
ou tiennent-ils simplement des épreuves
pour connaître les forces qui leur sont étrangères
pour défier les lois de la nature
comme le font les hommes
horizon inondé mirage évaporé
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5. |
Les soirs sans nom
03:40
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LES SOIRS SANS NOM
les soirs sans nom sont ouverts
la soif de vivre au bout des jours obscurs
ce sont des fêtes secrètes
des espaces où le temps passe autrement
soirs sans nom
soirs sans nom
ils ne sont pas à l’horaire
on les attrape au vol si on s’élève
si on sort du régiment
des lieux communs des mots vides de sens
soirs sans nom
soirs sans nom
en dehors des faux chemins
des embouteillages d’idées reçues
pour ôter les étiquettes
pour que la vie redevienne un cadeau
soirs sans nom
soirs sans nom
hors de la grande machine
à produire et reproduire le même
les soirs sans nom nous attendent
à l’heure incertaine où tout est possible
soirs sans nom
soirs sans nom
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6. |
Mutinerie
03:30
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MUTINERIE
1
mutinerie d’une nuit d’avril
écoute, dit un mort à son voisin
des gouttes de pluie se mettent à danser
elles s’arrêtent un instant
une pulsation martèle le silence
c’est mon cœur entends-tu je revis
la terre s’éveille
je refuse de dormir
2
écoute encore un instant
un doux crépitement tient le monde
en respect
chantiers déserts villes-champignons
immobiles
une araignée sous la douche
trêve de tentacules
3
le décor se dissout les couleurs chantent
l’ombre et la lumière jouent à cache-cache
le vent trame un drôle de ballet
deux trois nuages regagnent leur tanière
un souffle d’orage excite les feuillages
s’apaise sans raison
la vie roule dans mes yeux
éclat d’étoile du fond des années-lumière
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7. |
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LIGHTS OF THE CITY (SEXE ET VIOLENCE)
Lights
of the city
always lights
upon lights
streets
glowing so bright
run with shadows
in the night
violence des images
caresses du regard
avec un coup d’pied
ou par un baiser
avec un sourire
ou à grands coups d’poings
je peux t’étendre
sexe et violence
au creux du temps que transporte le vent
des oiseaux font l’amour dans leur nid
pendant que des chats se battent
pour aller les dévorer
des femmes rêvent à l’amour
des hommes d’un lointain pays
pendant que des soldats
leurs maris
se massacrent au-delà des frontières
everything is alive
everyone just seems so strange
you have fire in your eyes
and you shiver with desire
you’re all spinning in your cars
and you’re burning all the streets
and you’re walking in and out
of all the bars
sexe et violence
le feu fait bouillir
l’eau qui l’éteint
sexe et violence
patte de velours
et griffes de fer
sexe et violence
communication universelle
un baiser pour te dire qui je suis
un fusil pour te le rappeler
d’un bout à l’autre du monde
quand ce n’est pas un c’est l’autre
la nuit dans leur prison
des criminels pleurent
hallucinations sur les murs
peuplés d’images mortes
love is biting you
like a crazy dog from hell
you’re a danger for yourself
you’re a zombie murderer
blow your mind all night
until dawn opens your eyes
sad you never saw the things
you should have seen
sexe et violence
rose écarlate
épines sanglantes
sexe et violence
des blessures et des soins
des mains qui brisent et qui soulagent
sexe et violence
je peux m’approcher de toi
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8. |
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ELLE SE DEMANDE OÙ VA LA NUIT
elle se demande où va la nuit
avec ses lumières et ses ombres
elle se demande ce qu’elle entend
quand le silence se fait pesant
elle voudrait s’enfuir n’importe où
hors de ce temps hors de ce monde
au bout de tout au bout de rien
elle se morfond à sa fenêtre
cherche des yeux une passerelle
vers un paysage enchanté
là où rien ne lui ferait mal
elle se demande où va la nuit
avec sa faune de moteurs
elle se demande si dans le noir
quelqu’un viendra à son secours
un être épargné par le vent
qu’une étoile déposerait chez elle
comme une douce raison d’être
elle se demande si cette chanson
a été écrite pour elle
elle guette des signes dans le ciel
pour donner un sens à sa vie
elle se demande où va la nuit
elle se demande où va la nuit
elle se demande où va la nuit
et si elle reverra le jour
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9. |
Ici depuis toujours
04:15
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ICI DEPUIS TOUJOURS
1
je sors de la douche et
quelque part dans une jungle tropicale
la pluie cesse
derrière la fenêtre un décor
aussi transparent que la vitre
à l’infini des couleurs se succèdent
à travers les maisons du quartier
disparaissez
soleils empalés par des tours à bureaux
nuages déchirés d’oiseaux sanglants
aujourd’hui je ne prends pas la route des heures
le temps peut toujours me courir après
2
les maigres boisés si frileux
aux abords des quartiers résidentiels
se gonflent de brousse
aux yeux asphyxiés par la grisaille
l’air est une couleur précise mais sans nom
une cascade aux chuchotements délirants
éclairs de chaleur éclats de soudure
c’est toujours le même été qui continue
visage d’enfant attentif aux feuillages
les autres saisons n’étaient qu’un rêve
je m’éveille à l’odeur des champs
dans l’orchestre invisible mon cœur bat
je suis ici depuis toujours
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10. |
Le sourire de Les Paul
03:45
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LE SOURIRE DE LES PAUL
jusqu’à son dernier souffle à 94 ans
les doigts déformés par l’arthrite
Lester William Polsfuss a continué de jouer
un sourire d’enfant heureux sur son visage
Les Paul est vivant
dans chaque instrument qui porte son nom
et je préfère les guitares aux armes à feu
pour combattre le mal et un peu changer le monde
en branchant le micro dans l’ordinateur
je pense aussi à Les Paul
pionnier de l’enregistrement multipiste
ses expériences sonores résonnent encore
comme le peintre aux techniques mixtes
le musicien intègre le mixage à son art
comme Rimbaud devient un opéra fabuleux
dans la chambre d’écho des gitans somnambules
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11. |
Sur une terrasse
02:30
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SUR UNE TERRASSE
sur une terrasse j’ai eu tant de conversations
ce n’était pas tant pour refaire le monde
que pour prendre le temps par la main
tout ce temps qui court sans savoir où aller
qui s’envole et vole sans jamais atterrir
sur une terrasse chez moi les nuits d’été
il m’arrive de veiller seul avec le temps
pas nécessairement apaisé mais en harmonie
avec les astres
avec les arbres
avec les arbitraires moissons de la vie
je rêve d’entendre se concerter
les voix humaines de toutes les terrasses
je rêve de les entendre enfin en accord
avec le feu l’air l’eau et la terre
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12. |
Sur le chemin étoilé
04:50
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SUR LE CHEMIN ÉTOILÉ
comme un regard croisé un instant
des phares traversent la nuit
la fenêtre peuplée de reflets
les lignes de vie et les ombres du temps
sur leurs branches fanées dans l’automne avancé
les pimbinas encore rouges au matin
beaux petits fruits de ce qui a été
des jours qui ne sont toujours pas morts
viens sur le chemin étoilé
quoi qu’il en soit
j’irai chanter la joie
viens sur le chemin étoilé
quoi qu’il en soit
je serai avec toi
le temps fait bouger les choses
comme on déplace de l’air en marchant
tranquillement le soir descend
et on passe d’une saison à une autre
revient le souvenir des cailloux lancés
sur le lac gelé juste avant l’hiver
un appel à retourner dans ce sentier
pour rebondir sur la dureté du monde
viens sur le chemin étoilé
quoi qu’il en soit
j’irai chanter la joie
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Jean Perron Québec
Écrivain, musicien et artiste visuel, Jean Perron a publié 24 livres en plus de créer entièrement plusieurs albums de pièces instrumentales, de chansons et de poésie accompagnée de musique. Il réalise aussi des courts métrages, y compris des vidéos de certaines de ses compositions. ... more
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