1. |
Tendre l'oreille
03:40
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TENDRE L’OREILLE
les réponses que souffle le vent
font scintiller certains jours
dans la poussière des ans
le moment ne se laisse pas vraiment saisir
mais on peut le savourer
en étant réceptif à son passage
en étant ouvert à la vie qu’il recèle
parmi tout ce qui meurt
et tout ce qui tue
nous émergeons de l’eau des origines
pour aborder non sans frissons dans le présent
un enfant fait des sons pour parler aux oiseaux
et les oiseaux semblent lui répondre
tant de choses qui se perdent
dans l’air nous interpellent
avant de disparaître
mais savons-nous tendre l’oreille
à d’autres voix que celles qui donnent des ordres
la beauté murmure toujours ses secrets
sèche les larmes pour mieux creuser des sillons
où la pluie fait renaître la terre
la lumière s’accouple au vent
sable les visages
et fait apparaître
leurs traits les plus importants
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2. |
Comprendre
03:50
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COMPRENDRE
est-ce si difficile de comprendre
que nous ne comprenons pas
ce que comprend
la compréhension
d’autres incompris
à vrai dire je ne comprends rien
à ce que j’aime écouter du vent d’été
il ne dit probablement rien du tout
sauf que je suis en vie
comme les feuillages
et comme eux j’émets des sons
au contact de son souffle
l’enfant qui pour la première fois
souffle sur le pollen d’une fleur
et tend l’oreille aux voix des herbes et du ciel
est peut-être aussi près qu’il ne le sera jamais
de comprendre
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3. |
Force tranquille
03:10
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FORCE TRANQUILLE
j’entends couler la même eau
derrière les mêmes arbres
j’entends couler l’eau de la même rivière
derrière un rideau d’arbres
le même depuis je ne sais combien d’années
les chiffres n’ont pas vraiment d’importance
face à ce qui ne change pas vraiment
le son de cette eau
du temps qui n’arrête jamais de passer
derrière des arbres en apparence immuables
je l’entends encore quand je suis ailleurs
que dans ce parc où je m’arrête souvent
après avoir longtemps marché
c’est une force tranquille
j’aime écouter
ses nuances infinies
du premier mouvement de la vie
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4. |
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FLOTTER COMME UNE MUSIQUE
comme la poussière comme le pollen
avec la légèreté de notes soufflées
flotte la pluie d’un jour entièrement gris
dans une clarté empruntée à la nuit
entre les lignes des saisons
entre les lieux habités et l’endroit rêvé
sur des chemins qui disparaissent au loin
au milieu des vapeurs
de tout ce qui respire et se déplace
flotte la pluie dans l’air du temps
avec des airs de musique de tous les temps
à jouer sur n’importe quel instrument
ou simplement en chantant des mots
peut-être même juste des sons
des voyelles un peu détrempées
pour s’atteler à un langage
capable de passer sous le radar
de dépasser ce qui disparaît au loin
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5. |
Accompagnement
02:55
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ACCOMPAGNEMENT
Je marche à côté d’une joie
D’une joie qui n’est pas à moi
D’une joie à moi que je ne puis pas prendre
Je marche à côté de moi en joie
J’entends mon pas en joie qui marche à côté de moi
Mais je ne puis changer de place sur le trottoir
Je ne puis pas mettre mes pieds dans ces pas-là
et dire voilà c’est moi
Je me contente pour le moment de cette compagnie
Mais je machine en secret des échanges
Par toutes sortes d’opérations, des alchimies,
Par des transfusions de sang
Des déménagements d’atomes
par des jeux d’équilibre
Afin qu’un jour, transposé,
Je sois porté par la danse de ces pas de joie
Avec le bruit décroissant de mon pas à côté de moi
Avec la perte de mon pas perdu
s’étiolant à ma gauche
Sous les pieds d’un étranger
qui prend une rue transversale.
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6. |
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LA FORÊT QUI CACHE L’AUTOROUTE
le petit pont couvert de rouille
l’eau tapissée de nénuphars
des graffiti sur des rampes de béton
des fleurs en harmonie avec leurs couleurs
devant mes yeux
partout autour
que des arbres leurs feuilles
leurs écureuils et leurs oiseaux
parfois un chevreuil un brin sur le qui-vive
pourtant à mes oreilles s’imposent
les bruits de la circulation automobile
de l’autoroute tout près de ce boisé
aucune idée où va le monde
je suis un cœur gravé dans l’écorce
qui bat au rythme des moteurs
avec la persévérance d’un pic bois
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7. |
Entre mirage et oasis
03:05
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ENTRE MIRAGE ET OASIS*
les moteurs bâillent
les phares s’interrogent
des éclats de musique
se bousculent
dans ce stationnement
où je l’attends
tableau de bord ciel automobile
la brume se pâme devant les phares
le soir roule avec elle qui glisse sa voix
dans la chanson à la radio
le pays bleu de ses yeux
apparaît
sur les arbres vêtus d’ombre
qui saluent notre passage
en rang d’honneur
son rire de rose sans épine
où ne perle que tendresse éclose
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8. |
En prolongation
03:40
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EN PROLONGATION
dans la douce torpeur de certains soirs d’été
aux cris des grillons se mêlaient
les sifflets les huées
les hurlements de joie
et les voix des commentateurs
assis dehors mon père et moi
tout en bavardant nous l’écoutions d’une oreille
le baseball des Expos à la radio
de ces soirs sans histoire
et pourtant si habités
ne restent que les modulations des grillons
les Expos n’ont pas remporté de championnat
et nos conversations n’ont pas changé le monde
en fait il n’y avait aucun enjeu
juste le monde qui vivait
juste la vie qui passait
être là et réunis
c’était tout ce qui comptait
et ce sera toujours tout ce qui compte
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9. |
Un oiseau de nuit
03:20
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UN OISEAU DE NUIT
vers l’heure où le soir fait changer le jour de date
une voisine sort arroser ses fleurs
j’entends l’eau se frayer un passage
au creux de la terre
et dans les méandres de demain
la vie se perpétue grâce à de petits gestes
posés avec amour et sans éclat
l’obscurité a ses héros
sûrement plus nombreux que ses monstres
sinon tout serait fini depuis longtemps
aux heures de grande torpeur se glisse un souffle
un soupçon de fraîcheur parmi les doutes
j’éteins la lumière devant ma porte
pour ne pas m’y brûler comme un insecte
j’apprends à faire confiance aux ténèbres
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10. |
Sur le rebord d'un rêve
03:05
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SUR LE REBORD D’UN RÊVE
sur le rebord d’un rêve je contemple le monde
et combats les démons du vertige
les sons scintillent avec les feux des rues
je guette la venue de super héros
sur le rebord d'un rêve
un rêve
au rythme haletant d’un coeur d’enfant
on enchante le monde et invente le bien
il faut retrouver chaque jour volé
en faisant appel aux pouvoirs de la nuit
nous sommes des sources de lumière
dans l’obscurité des chemins perdus
et les morceaux oubliés de la vie
nous savons les jouer à l’oreille
sur le rebord d'un rêve
un rêve
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11. |
Le chemin du coeur
03:45
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LE CHEMIN DU CŒUR
la pluie d’été quand le vent la laisse tranquille
ajoute sa voix
au chant de la terre et de la nuit
des portières claquent au loin avec un bruit sourd
des hommes échangent quelques mots insaisissables
l’averse est la trame sonore de leurs vies
étrange coïncidence
cette eau qui n’en finit plus de se déverser
le jour où j’apprends la mort d’un ami
le chemin du cœur est lavé de tout soupçon
de toutes les saletés laissées par la peur
les larmes deviennent les affluents d’un fleuve
peu à peu la pluie diminue et laisse place
à un tambourinement dans les gouttières
et tout ce qui vit continue de pousser
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Jean Perron Québec
Écrivain, musicien et artiste visuel, Jean Perron a publié 24 livres en plus de créer entièrement plusieurs albums de pièces instrumentales, de chansons et de poésie accompagnée de musique. Il réalise aussi des courts métrages, y compris des vidéos de certaines de ses compositions. ... more
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