1. |
Braises
04:35
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BRAISES
au fond du ciel les dernières traces du jour
je ralentis le tempo de mes pas
des adolescents lancent des roches dans l’eau
d’autres roches se font entendre sous mes pieds
au-dessus d’un terrain de baseball
s’allument les réflecteurs
et avec les nuages
s’effilochent nos uniformes d’enfants
chaque jour la partie commence pour certains
et se termine pour d’autres
les enfants aiment jouer à mourir et revivre
mais les sacs à dos deviennent lourds de deuils
des cris volatiles ravivent la nuit
les braises d’un jour ensoleillé nous rappellent
que tout se consume
les bolides terrestres comme les météores
dans ses ramifications
avec ses colliers de phares
et ses bracelets de lampadaires
la ville se retire
peut-être pour pleurer peut-être pour aimer
peut-être pour jouer des airs inédits
une horloge ancienne sonne minuit
douze coups profonds un pour chaque mois
chaque heure est chargée
d’années d’anniversaires et de cartes du ciel
de constellations de langages
entre les battements fatidiques
parfois la nuit observe un moment de silence
et je l’observe avec elle
dans les lueurs des lampes de lecture
et les parfums des parterres
qui entrent par les fenêtres
par brassées de souvenirs et de rêves
et parfois la nuit se met à frémir
se joint à l’orchestre des petits bruits
doucement la pluie remplit les mots d’émotion
pleure à notre place quand il faut rester forts
un aboiement se fait de plus en plus lointain
et emporte l’appel à l’aide d’un enfant
mais je reste là à douter et redouter
sans rien pouvoir retenir de ce qui s’en va
seule la beauté insiste pour rester
au cœur de la nuit recommence la vie
dans l’obscurité naît une autre journée
bien avant d’être visible à l’horizon
l’oiseau de nuit finit aussi par s’en aller
les premiers sons du matin traversent la pluie
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2. |
Sensation
03:55
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3. |
L'été revient
03:50
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L’ÉTÉ REVIENT
L’été revient dans la nature
Avec ses riantes couleurs;
Les bois revêtent leur parure
Et les prés verts s’ornent de fleurs.
Les nuits se parsèment d’étoiles,
Et sur l’onde glissent les voiles
Vers des rivages enchanteurs.
Les oiseaux tour à tour reviennent
Dans les bosquets, sur les rameaux
Chanter leur mélodie ancienne.
Dessous les toits pointus et hauts,
S’abritent les nids d’hirondelles;
Et tout n’est que bruissement d’ailes
Dans la brise et les vents plus chauds.
L’été revient dans la nature
Avec ses riantes couleurs;
L’oiseau chante sous la ramure
Et les prés verts s’ornent de fleurs.
C’est la saison joyeuse et douce,
C’est le réveil des nids de mousse,
Et c’est le rêve dans les cœurs.
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4. |
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CHANSON DE LA PLUS LONGUE JOURNÉE
la plus longue journée de l’année était belle
il n’y avait pas un seul nuage
comme un regard d’enfant qui découvre le monde
dans le ciel et tout ce qu’il éclaire
à la tombée du jour du solstice d’été
je suis allé filmer l’horizon
je voulais contempler sur l’eau de la rivière
le plus tenace éclat de soleil
la clarté s’étirait les maringouins sortaient
et moi j’étais devenu statue
caméra dans les mains sous les feux du couchant
je regardais ce jour s’endormir
j’attendais que le pont là-bas à l’horizon
se pare enfin de ses feux de nuit
dans l’air rien ne tremblait mais coulait la rivière
le temps passait mais sans se presser
j’espérais qu’il en reste un peu de sa lumière
la plus longue journée de l’année
pour éclairer nos pas nos décisions nos vies
la clarté du solstice d’été
les plus belles images que j’en ai gardé
ne sont pas celles que j’ai filmées
mais plutôt dans mon cœur pour les jours les plus sombres
quelques pensées d’un monde éclairé
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5. |
Apprivoiser
04:20
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APPRIVOISER
Jours de plage, le soleil met en lumière les graffitis inscrits sur la peau; sur les corps qui hésitent entre rester étendus parmi les grains de sable et se jeter à l’eau. Tatouées un peu partout, des devises : bien vivre sa vie, saisir le moment. Et tenter de faire de son corps une œuvre d’art.
apprivoiser la noirceur du monde
ne pas me laisser mener en bateau
mener ma barque comme je l’entends
Dans les tours à bureau il n’y a pas de saisons il n’y a pas de raisons il y a des directives. Les arrivistes sont des serpents; ils rampent devant l’autorité et mordent les subalternes. Sur les chemins d’été l’asphalte est troué par le bec des rapaces; ceux qui n’ont pas d’ailes et coupent celles des autres pour s’en faire des rideaux.
par une chaude nuit d’été
j’écris à la plume dans un cahier
j’entends gémir un train au loin
quelqu’un me dit que c’est mort ici
Seul dans la nuit un lièvre traverse la rue en courant sous le ciel étoilé. Et ce lièvre est chaque instant qui passe, égaré. Des mouches à feu dansent avec les étoiles entre l’herbe et le ciel. Une autre bûche ajoutée à mon feu disparaît dans la braise.
par une chaude nuit d’été
apprivoiser la noirceur du monde
et le temps ne s’arrête pas
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6. |
L'ombre et la proie
03:45
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L’OMBRE ET LA PROIE
non l’ombre ne sera jamais la proie
le cri mélancolique du grillon solitaire
résonne comme un signal d’alarme
et le chant majestueux des cigales
fait glisser dans le lointain des ténèbres
les jappements du chien qui a peur
non l’ombre ne sera jamais la proie
nous le savons trop bien nous qui nous cherchons
dans la transparence des nuits d’été
quand le vent caresse un rêve si doux
que les étoiles se mettent à danser
et nous rappellent notre éternité
non l’ombre ne sera jamais la proie
dans le vent des nuits d’été
sur la peau attentive et muette
un clair langage ne veut plus se taire
la terre n’est pas morte
non la terre n’est pas morte
comme la belle au bois dormant
elle attend le baiser qui la fera revivre
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7. |
Bonne pensée du matin
03:50
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BONNE PENSÉE DU MATIN
À quatre heures du matin, l'été,
Le sommeil d'amour dure encore.
Sous les bosquets, l'aube évapore
L'odeur du soir fêté.
Mais là-bas dans l'immense chantier
Vers le soleil des Hespérides,
En bras de chemise, les charpentiers
Déjà s'agitent.
Dans leur désert de mousse, tranquilles,
Ils préparent les lambris précieux
Où la richesse de la ville
Rira sous de faux cieux.
Ah! pour ces Ouvriers charmants
Sujets d'un roi de Babylone,
Vénus! laisse un peu les Amants,
Dont l'âme est en couronne
Ô Reine des Bergers!
Porte aux travailleurs l'eau-de-vie,
Pour que leurs forces soient en paix
En attendant le bain dans la mer, à midi.
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8. |
Le chant du cristal
05:00
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LE CHANT DU CRISTAL
1
Tout vit, tout agit, tout se correspond;
les rayons magnétiques émanés de moi-même ou des autres
traversent sans obstacles la chaîne infinie des choses crées;
c’est un réseau transparent
qui couvre le monde,
et dont les fils déliés se communiquent
de proche en proche
aux planètes et aux étoiles.
Captif en ce moment sur la terre,
je m’entretiens avec le chœur des astres,
qui prend part à mes joies
et à mes douleurs!
2
Un soupir, un frisson d’amour sort du sein gonflé de la terre,
et le chœur des astres se déroule dans l’infini;
il s’écarte et revient sur lui-même,
se resserre et s’épanouit,
et sème au loin
les germes des créations nouvelles.
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9. |
La guitare de Reverdy
03:35
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LA GUITARE DE REVERDY
Par le tuyau du ciel ouvert le vent arrive
Un nuage affolé poursuit son ombre sur la rive
Et sur le hâle du plafond
Une ligne blanche
Plus large
Où le profil brutal monte vers l’horizon
Dans la marge le ciel se froisse
Tout le long de l’eau radoucie
Sur la peau moite de la plage
Où les pas sont à peine inscrits
La fenêtre au dernier étage
Un chemin découvert par où viendra la nuit
***
Les bancs sont prisonniers
Des chaînes d’or du mur
Prisonniers des jardins où le soleil se cache
Près de la forêt vierge
De la prairie étale
Du pont qui tourne à pic
Dans l’angle le plus droit
La boîte des nuages s’ouvre
Et tous les oiseaux blancs s’envolent à la fois
Tapis plus vert que l’eau plus doux que l’herbe
Plus amer à la bouche et plus plaisant à l’œil
Les arbres à genoux se baignent
L’air est calme et plein de sommeil
La lumière s’abat
Le jour perd ses pétales
Plus haut c’est tout d’un coup la nuit
Les regards entendus
Et le clignement des étoiles
Les signes
Par-dessus les toits
***
L’enseigne de la rue dévoile son mystère
Le bras tendu près du balcon porte un haltère
Les yeux sont agrandis par un dernier rayon
Le clocher devient bas
Un nuage le casse
Dans le jardin l’arbre pourrait tomber
Une main rassemble les branches
Et les serre comme un bouquet
Les mille doigts du vent frappent plus fort à la fenêtre
La tête qui paraît regarde dans le ciel
Attend ce qui peut arriver
Les cercles lumineux qui fermaient le tonneau du monde se défont
Et l’air plus chaud qui monte
Soulève le plafond
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10. |
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À LA CHARNIÈRE DES FIÈVRES
la fièvre du jour s’éteint lentement
on recommence à respirer
les nerfs redeviennent des cordes de guitares
ils demandent à chanter
la nuit sort de ses langes de feu
la noirceur apaise la terre
ce n’est pas encore l’heure du crime
même pas encore l’heure du doute
le vent se fait discret les nuages recueillent
les cris des écoliers qui s’attardent
et les murmures des amants clandestins
dans les stationnements de n’importe où
les frontières disparaissent
sous les lumières de la ville
à chaque clignotement
les voitures semblent échanger des signes secrets
on aimerait pouvoir décoder
de fatigués à langoureux regards balles perdues
les feux s’accordent au souffle des ténèbres
des feuilles mortes revivent dans les bras du vent
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Jean Perron Québec
Écrivain, musicien et artiste visuel, Jean Perron a publié 24 livres en plus de créer entièrement plusieurs albums de pièces instrumentales, de chansons et de poésie accompagnée de musique. Il réalise aussi des courts métrages, y compris des vidéos de certaines de ses compositions. ... more
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